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Un convoi sous haute protection

Dans un ouvrage consacré à la justice ecclésiastique, Daniel Le Blévec, professeur d'histoire médiévale à l'Université Paul-Valéry Montpellier III, s’est intéressé au fonctionnement de la justice des évêques de Maguelone, d’après des sources aux archives du Vatican.

L’auteur y relate notamment le transfert de 4 prisonniers sous bonne garde depuis Montpellier jusqu’au château de Montferrand en 1366, en pleine Guerre de Cent Ans, alors que la région est infestée de mercenaires à la solde des Anglais.

Les 3 cellules de Montferrand : la diablesse, la comtesse, la marquise. Croquis : TRC
Les 3 cellules de Montferrand : la diablesse, la comtesse, la marquise. Croquis : TRC

« (…) Chaque cour de justice de l’évêque a sa prison. Celle qui est attachée à la Salle l’Evêque à Montpellier ne sert que pour la détention provisoire, le temps de l’instruction et du déroulement du procès. Les condamnés sont ensuite transférés sous bonne escorte, pour y purger leur peine, au château de Montferrand. (…)

Attardons-nous par exemple sur la relation, très détaillée, du transfert de quatre prisonniers effectué le 12 février 1366 depuis Montpellier jusqu’au château de Montferrand. Il s’agit d’ecclésiastiques : un prêtre du diocèse de Rodez, Guillaume Fabre, un clerc du diocèse de Langres, Guillaume Sergent, un autre clerc, Pierre Chabrier, le quatrième, Darnilis de Saint-Affrique, étant simplement qualifié de « frater ». Jugés pour des délits dont nous ne savons rien, ils ont été condamnés à une peine d’emprisonnement. On sait seulement, par des dépenses signalées ailleurs dans le registre, que le prêtre Guillaume Fabre a déjà accompli 125 jours de prison préventive à la Salle-l’Evêque, où il a été ad panem domini, c’est-à-dire qu’il a reçu pour se nourrir deux pains par jours. Guillaume Sergent lui aussi a fait de la préventive à Montpellier, pendant 57 jours.

Après leur procès et leur condamnation, ces deux clercs sont donc confiés, avec deux autres prisonniers, à une escorte de 17 sergents. Quittant Montpellier dans la soirée, se déplaçant à pied, deux animaux sont mentionnés (peut-être pour porter les effets des condamnés), la petite troupe doit passer la nuit dans l’église Saint-Côme, sanctuaire semi-rural situé à peu de distance de la ville. On a prévu un dîner, pain, vin, viande et potage, et pour les animaux de l’avoine et du foin. On a également acheté des chandelles, ainsi que des cordes pour tenir attachés les prisonniers. Le lendemain, on reprend la route. On fait une pause à Montferrier où l’on achète du pain pour se restaurer. Là on apprend que la route pour Montferrand n’est pas sûre propter societates qui erant ibi. C’est la période en effet où des bandes de routiers rôdent dans la région et accentuent l’insécurité des déplacements. On va donc louer les services d’un guide qui connaît un chemin discret (iter secretum) jusqu’à Montferrand. Cet itinéraire passe par Saint-Jean-de-Cuculles, où une nouvelle pause est faite pour se désaltérer (pro potu). La troupe peut ensuite conduire les prisonniers à destination, puis revenir sans s’arrêter jusqu’à Montferrier où les sergents déjeunent, en consommant le même menu (pain, vin, viande, potage). »

Daniel Le Blévec, article « La Justice des évêques de Maguelone (1364-1369) », pp. 269-283, paru dans « Les Justices d'Église », Toulouse, Éditions Privat, 2007, 560 p. (Cahiers de Fanjeaux, 42)

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