Un nom sans lignage ?
On a longtemps pensé que l’étymologie de Montferrand signifiait "mont de fer", renvoyant à la position stratégique de la place militaire. Aussi séduisante qu'elle soit, cette hypothèse semble peu convaincante aujourd’hui.
Le terme Montferrand, d'origine médiévale, caractérise de nombreux lieux-dits, villes et châteaux en France. Sans preuve textuelle claire, il est impossible d'établir un lien entre le château de Saint-Mathieu-de-Tréviers et un personnage précis portant le nom de Montferrand. Aucun texte connu n'atteste d'un tel lignage.
Parmi la centaine d'actes rattachés à la juridiction de Montferrand, un serment de fidélité du début du XIIe s. fait pourtant référence à trois hommes prénommés Hugo, Gui et Guiraud Raimond, dits « de Montferrand ». Ces trois personnages forment-ils une lignée aristocratique subalterne qui aurait des droits sur le castrum et qui, par conséquent, porterait le toponyme castral ? Ont-ils un lien avec les trois maisons de chevalier construites à la même époque et qui sont encore visibles aujourd’hui (zones 11, 14 et 18) ?
La référence à ce triple lignage aristocratique intervient au moment où le castrum est tenu en douaire par la comtesse Almondis, entre 1086 et 1132. Durant cette longue période, la plus stable du XIIe s., la permanence assurée par la comtesse favorise une certaine stabilité dans la gouvernance et l'occupation castrale.
Mais, à l’inverse, on peut tout aussi bien imaginer que ces trois personnages, issus d'une des nombreuses familles seigneuriales du sud de la France portant le patronyme « de Montferrand », ont pu transmettre leur nom au castrum naissant.
Or, la mort de la comtesse Almodis vers 1132 entraîne une longue période d’instabilité marquée par l’ingérence de puissantes familles à la tête du comté et du château (seigneur de Montpellier, comtes de Toulouse, comte de Provence, seigneur d’Alès), empêchant tout lignage toponymique de s'épanouir.
Le choix de l'emplacement
Comme de nombreux châteaux du Bas Languedoc, Montferrand s’inscrit dans la tradition architecturale militaire régionale à l’image d’autres sites fortifiés comme Saint-Guilhem-le-Désert (château de Verdus, dit « des Géants »), Assas…
Pour les bâtisseurs de l’époque, il s’agit de tirer le plus grand parti possible de la configuration naturelle du site, afin d’économiser des dépenses inutiles. Le château joue alors le rôle de lieu de refuge fortifié pour les populations locales, les assaillants dépassant rarement quelques centaines d’hommes.
L’emplacement choisi pour la construction est donc primordial : le château est conçu pour surveiller les environs, voir loin, mais aussi être vu, comme symbole de l’autorité comtale et de protection sur les populations.
Mais ce choix entraîne un problème majeur : celui de l’approvisionnement en eau. Le château étant éloigné de toute source directe et privé de puits, il faut prévoir l’installation de citernes : on en dénombre au moins trois à Montferrand, construites spécifiquement ou installées dans d’anciennes caves, à mesure du développement des besoins de ses occupants.
Enfin, le château est au carrefour des « trés viès » (trois voies) qui a donné son nom au village en contrebas : il est idéalement situé au croisement des routes de Vieille-Toulouse, entre Nîmes et Aniane, de Mauguio aux Cévennes et des Matelles à Quissac.
Quelle que soit la dimension du site, les maçonneries soignées marquent une réelle distinction entre les bâtiments aristocratiques et les bâtiments à usage domestique.
Au XVIIe siècle, les travaux d’aménagement de la place d’armes (zone 19) vont considérablement modifier la topographie médiévale entre ces deux logis primitifs en faisant disparaître de nombreuses traces. C'est à cette époque que le remblai est apporté au nord de la maison 14 pour aménager un perron couvert, comme en témoignent les boulins encore observables dans le mur. L'édifice est alors appelé "maison de l'amandier".
Malgré toutes ces transformations, le mur médiéval reliant les deux maisons de chevalier est conservé sur une longueur de 14 m. Ce mur, qui ceinturait le premier réduit fortifié, est encore percé par une petite archère en sifflet. Cependant, sa faible épaisseur de 55 cm, son couronnement dépourvu de défenses et sa hauteur de 2,30 m lui confèrent un rôle plus symbolique que défensif.